La candidate des Verts à la Chancellerie, seule femme en lice
Annalena Baerbock a été choisie le 19 avril comme candidate des Verts (Bündnis90/Die Grünen) à la chancellerie pour succéder à Angela Merkel en Allemagne. Si elle est la seule femme actuellement en lice, elle n’a jamais exercé de fonction dans un exécutif fédéral, régional ou communal. Son expérience politique repose uniquement sur ses études de sciences politiques, son passage comme assistante parlementaire au Parlement Européen, ses deux mandats successifs depuis 2013 de députée au Bundestag et la co-présidence de son parti depuis 2018. Certains observateurs de la vie politique allemande se demandent donc si elle bénéficiera de la confiance des électeurs, malgré la situation favorable de son parti d’après les sondages actuels, suite aux péripéties récente de la coalition actuelle CDU/CSU-SPD au pouvoir (contradictions sur le terrain dans la gestion de la crise sanitaire, scandales, choix chaotique du candidat commun CDU/CSU Armin Laschet).
Mais sa jeunesse (40 ans), par rapport aux deux autres candidats déclarés, Armin Laschet (60 ans) pour la CDU/CSU, Olaf Scholz (62 ans) pour le SPD, impliqués depuis de nombreuses années dans la vie politique constitue un atout. Suite aux bouleversements liés à la crise sanitaire, son programme affichant une rupture avec ceux de ses concurrents tout en demeurant pragmatique (objectifs d’une prospérité respectueuse du climat et d’un capitalisme régulé) lui donne aussi des chances d’élargir l’électorat de son parti. Les Verts ont montré aussi leurs compétences pour gérer un état régional connu pour ses industries, en particulier automobiles, mécaniques et électrotechniques, les électeurs leur ont accordé récemment un deuxième mandat successif à la tête du Land de Baden-Württemberg.
Un scrutin qui relative l’importance de la personnalité
Les prochaines élections au parlement fédéral (Bundestag) auront lieu le 26 septembre 2021. Un rappel des modes de scrutins relativise l’importance de la personnalité des candidats/es par rapport au système français de suffrage universel direct pour l’élection du Président de la République.
La moitié des députés au Bundestag est élue dans les circonscriptions et l’autre moitié par un scrutin de listes. L’électeur allemand s’exprime deux fois sur le même bulletin de vote: la 1ère fois il coche la case correspondant à un candidat dans sa circonscription, la 2ème fois il coche la case correspondant à une liste présentée dans son Land par un parti ou un groupe d’intérêt local. L’électeur a le droit d’émettre 2 votes différents, il peut, par exemple, estimer son député sortant et le réélire, même s’il n’aime pas par ailleurs son parti, et voter ensuite pour le parti qu’il soutient personnellement.
Le scrutin de listes détermine par les pourcentages de voix obtenues le nombre de sièges pour chaque parti avec une clause de 5% minimum. Cette clause ne s’applique qu’au scrutin de listes. Un député élu dans une circonscription et appartenant à un parti recalé par cette clause conserve bien entendu son élection, mais son parti ne peut pas créer de groupe parlementaire. De même un parti qui obtiendrait 100 sièges selon son pourcentage au scrutin de listes, mais a obtenu 110 sièges dans les circonscriptions, conserve ses 10 députés supplémentaires. Ceci explique la fluctuation du nombre de députés en fonction de chaque élection: actuellement 709 pour un Bundestag initial de 598 sièges.
Majorité absolue difficile à obtenir
Ce mode de scrutin, dit “proportionnel personnalisé”, a pour objectif de compléter le scrutin uninominal dans les circonscriptions par une part de proportionnelle dans les Länder. Un parti atteint difficilement dans ces conditions une majorité absolue et les résultats entraînent la plupart du temps la nécessité de constituer une coalition gouvernementale entre plusieurs partis, deux au moins. Le Président Fédéral propose généralement le candidat ou la candidate à la chancellerie issue(e) de cette “majorité du chancelier ou de la chancelière” au vote des députés sans discussion préalable. Un vote de “défiance constructive” exprimé par une nouvelle majorité de fait peut mettre le chancelier ou la chancelière en minorité et entraîner sa démission. Ce fut le cas en cours de mandature pour la démission du chancelier Helmut Schmidt (SPD) et la première élection par le Bundestag du chancelier Helmut Kohl (CDU) le 1er octobre 1982, suite au renversement d’alliance du parti libéral FDP.
Démocratie du compromis
Les tractations peuvent être difficiles et longues, comme cela a été le cas pour la législature actuelle. L’allié pressenti par les chrétiens démocrates/chrétiens sociaux en Bavière (CDU/CSU ) arrivés en tête, le parti libéral (FDP), a quitté ensuite les tractations. Il a fallu se retourner vers les sociaux démocrates (SPD) pour constituer la majorité actuelle et renouveler ainsi la grande coalition droite-gauche, dite “Groko”, de la législature précédente, bien que le SPD eut exclu cette option dans son programme électoral. La réélection d’Angela Merkel a eu lieu le 14 mars 2018, alors que les élections du Bundestag avaient eu lieu le 24 septembre 2017!
Il serait donc aussi imaginable lors de tractations très difficiles entre plusieurs partis très divers ayant obtenu respectivement des résultats proches que l’on finisse par substituer au candidat ou candidate à la chancellerie du parti arrivé en tête avec un score assez faible un candidat plus consensuel accepté par l’ensemble des partis de la coalition.
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