Mardi 20 avril 2021 à 16 heures
Conférence animée par Jean-Marc Delagneau
Synthèse réalisée par Alain Ropers.
Vidéo de la conférence, à la fin de l'article
Un rendez-vous bisannuel:
Depuis quelques années, le Mouvement Européen de Seine Maritime saisit l’occasion de la Présidence Tournante du Conseil de L’Union Européenne, pour organiser une rencontre avec l’Ambassadeur, ou une haute personnalité diplomatique, du pays concerné. Ainsi, après le Ministre Plénipotentiaire de l’Ambassade d’Allemagne il y a six mois, c’est Son Excellence Jorge Ryder TORRES-PEREIRA, Ambassadeur du Portugal en France qui a accepté de nous consacrer du temps pour nous exposer les et répondre à nos questions.
La Pandémie au premier plan :
Pour commencer, Son Excellence nous a indiqué que ces trois premiers mois de présidence ont été, bien entendu, fortement marqués par la gestion de la situation sanitaire. Il a fallu favoriser la coordination entre les États membres pour gérer les approvisionnements et les exportations de vaccins, mettre en place les certificats numériques, définir les zones à risque. Tout cela a demandé une grosse dépense d’énergie. L’Union Européenne de la santé, qui était encore embryonnaire a pris une consistance certaine. La crise sanitaire a fait prendre conscience aux citoyens, les sondages l’attestent, que même dans ce domaine, le niveau national n’est pas forcément le plus pertinent.
(cf. le séminaire santé de juin 2020: https://mouvement-europeen76.eu/penser-europe-sante/)
Trois priorités pour la Présidence portugaise.
- La transition climatique et numérique : Il a fallu tenir le cap de la relance économique . Deux transitions jumelles, numérique et écologique, mèneront à un paysage économique et un paradigme bien différent de celui d’avant la crise. Mais ce plan de relance doit encore être ratifié par les 27 États. En Allemagne, par exemple, malgré le vote massif du Bundestag en faveur de ce plan, on attend la décision du Tribunal Constitutionnel de Karlsruhe sur un recours.
Les objectifs européens en matière de transition écologique auront l’occasion d’être affirmés lors de la COP 26 qui se tiendra à Glasgow en novembre prochain. Pour son Excellence, il n’y a pas que l’Europe verte, il y a aussi l’Europe bleue. Car les océans occupent la grande majorité de l’espace planétaire, ils sont un espace de biodiversité, et leur préservation est essentielle.
Les objectifs de transition numérique ont une forte dimension sociale, car les métiers et les compétences devront évoluer pour s’adapter. Un sommet social se tiendra à Porto les 7 et 8 mai 2021, qui réunira non seulement les acteurs institutionnels habituels (Commission, Conseil Européen, etc.) mais aussi les partenaires sociaux. Son Excellence nous fait part de son souhait de voir ce sommet suivi d’une déclaration forte du Conseil Européen définissant des objectifs ambitieux de l’Union Européenne dans le domaine social et faisant de cette réunion une sorte de Göteborg 2.
- Le socle des valeurs fondamentales : Une autre priorité, alors que certains peuvent être tentés par le repli sur soi, c’est de garder les valeurs fondamentales : liberté de la presse, pluralisme démocratique, liberté de circulation, Etat de droit, ce qui n’est pas toujours évident compte tenu des imbrications avec, entre autres, des questions sensibles comme l’immigration ou le droit d’asile.
- L’autonomie stratégique : La pandémie a montré le besoin de résilience au sein de l’Union Européenne, et la nécessité de doter l’Europe d’une autonomie stratégique ouverte au monde. Dans le domaine de la santé, mais pas seulement. Une des leçons que l’on peut tirer de la crise, est que la consolidation des grands acteurs ne peut constituer l’unique réponse. La politique économique européenne du futur devra s’appuyer sur les réseaux, les petites et moyennes entreprises, en lien avec les université, et les pôles de recherche, etc…
Bien que la politique extérieure de l’Union soit de la responsabilité du Haut-Commissaire Josep Borrell, et ne rentre pas dans les compétences de la Présidence tournante, son Excellence fait un rapide tour d’horizon des relations de l’Europe avec le reste du monde ;
– les États-Unis avec lesquels les relations devraient être plus faciles maintenant, la Chine, l’Inde, la Russie pour lesquelles l’Europe cherche le difficile positionnement juste entre fermeté et dialogue.
– Avec l’Afrique, on prépare un partenariat lors d’une réunion le 23 avril à Lisbonne, pour définir une stratégie commune pour renforcer l’importance de la transition verte aussi en Afrique.
– Avec l’Amérique latine, des accords sont en route avec le Mexique ou se préparent avec le chili. Sans oublier le Mercosur qui a nécessité une vingtaine d’années de négociations et qui bute en ce moment sur des difficultés de ratification finale, compte tenu des réticences des populations de certains États membres. Or la non ratification de cet accord nuit à la crédibilité de l’Union Européenne en affaiblissant sa parole contre les déforestations amazoniennes, par exemple.
Son Excellence nous fait remarquer que la langue portugaise est la langue maternelle largement majoritaire dans tout l’hémisphère sud, et que par le biais des réunions de la lusophonie le Portugal a un rôle important à jouer dans cette partie du monde.
– Enfin avec le Royaume Uni, l’ambition reste modeste : faire fonctionner l’accord de sortie c’est déjà beaucoup de travail. Le Portugal, est partisan de la relation la plus ample et la plus dense possible avec le Royaume Uni, ce qui n’est pas facile quand il s’agit de concilier les intérêts des uns et des autres.
Pour conclure :
Son Excellence nous parle en conclusion du bon rapport à l’Europe de la majorité des Portugais qui ont bien compris la pertinence du niveau Européen pour de nombreux problèmes, et évoque la prochaine conférence sur le futur de l’Europe dont l’un des buts est justement de réduire la distance entre les citoyens et les institutions.
Philippe Thillay remercie l’Ambassadeur, replace cette conférence en perspective parmi les actions du mouvement Européen de Seine Maritime. Lors des prochains séminaires sur le rapport de l’Europe avec les Territoires, et notamment le long de la Seine, il sera question des friches industrielles qui se reconvertissent à l’image de l’Europe qui entame sa double transition écologique et numérique.